New York, fin des années 70. La ville est sale, les immeubles délabrés, et il ne fait pas bon s'y promener seul après minuit, mais elle bouillonne de créativité. Les cinémas d'art et d'essai pullulent, les films au casting majoritairement noir connaissent leur âge d'or, et tous les espoirs d'une mixité harmonieuse semblent permis. C'est là que Paul, alias Pablo, fils d'un marchand de boutons juif, rêve de lancer sa carrière de cinéaste. Et que Jay Gladstone, promis à un avenir tout tracé dans l'immobilier, ambitionne de produire son premier long-métrage. Dans le rôle principal, Avery, comédienne afro-américaine qui voudrait devenir une star du grand écran. Un projet aussi ambitieux que fou, porté par l'enthousiasme de la jeunesse, qui pourrait bien rencontrer quelques obstacles...
Entre roman d'apprentissage fiévreux et comédie bouillonnante, Seth Greenland fait palpiter le coeur frénétique du New York des années 70, en piquant de sa plume acérée les contrastes infinis de cette ville inimitable, instantané d'une société américaine tiraillée entre quête de réussite à tout prix et complexes sociaux ou raciaux insolubles.
Bon plan !!!
Palmarès des libraires - Livres hebdo 2023Sélection Prix Femina Etranger 2023« Quand j'étais en prison, j'ai reçu un dictionnaire. Accompagné d'un petit mot : Voici le livre que j'emporterais sur une île déserte. Des livres, mon ancienne professeure m'en ferait parvenir d'autres, mais elle savait que celui-là s'avérerait d'un recours inépuisable. C'est le terme sentence que j'y ai cherché en premier. J'avais reçu la mienne, une impossible condamnation à soixante ans d'emprisonnement, de la bouche d'un juge qui croyait en l'au-delà. »Après avoir bénéficié d'une libération conditionnelle, Tookie, une quadragénaire d'origine amérindienne, est embauchée par une petite librairie de Minneapolis. Lectrice passionnée, elle s'épanouit dans ce travail. Jusqu'à ce que l'esprit de Flora, une fidèle cliente récemment décédée, ne vienne hanter les rayonnages, mettant Tookie face à ses propres démons, dans une ville bientôt à feu et à sang après la mort de George Floyd, alors qu'une pandémie a mis le monde à l'arrêt...On retrouve l'immense talent de conteuse d'une des plus grandes romancières américaines, prix Pulitzer 2021, dans ce roman qui se confronte aux fantômes de l'Amérique: le racisme et l'intolérance. Une histoire palpitante, flamboyante et délicieusement agitée. Page des Libraires
Emily St. John Mandel renouvelle le thème classique du voyage dans le temps à sa manière unique, dans une histoire envoûtante qui entremêle époques et personnages jusqu'au vertige. Quel est cet étrange phénomène qui semble se produire à diverses époques et toujours de la même façon?? Dans les bois de Caiette, au nord de l'île de Vancouver, des gens entendent une berceuse jouée au violon, accompagnée d'un bruissement évoquant un engin volant qui décolle. L'expérience est intense mais brève, au point que l'on pourrait croire à une hallucination. En 2401, sur une des colonies lunaires, l'institut du Temps veille à la cohésion temporelle de l'univers. Une brillante physicienne nommée Zoey s'interroge sur des anomalies qui la perturbent. Le monde tel qu'il existe ne serait-il qu'une simulation ?
En 1740, le vaisseau de ligne de Sa Majesté le HMS Wager, deux cent cinquante officiers et hommes d'équipage à son bord, est envoyé au sein d'une escouade sous le commandement du commodore Anson en mission secrète pour piller les cargaisons d'un galion de l'Empire espagnol. Après avoir franchi le cap Horn, le Wager fait naufrage.
Une poignée de malheureux survit sur une île désolée au large de la Patagonie. Le chaos et les morts s'empilant, et face à la quasi-absence de ressources vitales, aux conditions hostiles, certains se résolvent au cannibalisme, des mutineries éclatent, le capitaine commet un meurtre devant témoins. Trois groupes s'affrontent quant à la stratégie à adopter pour s'en échapper. Alors que tout le monde croyait que l'intégralité de l'équipage du Wager avait disparu, un premier groupe de vingt-neuf survivants réapparaît au Brésil deux cent quatre-vingt-trois jours après la catastrophe maritime. Puis ce sont trois rescapés de plus qui atteignent le Brésil trois mois et demi plus tard. Mais une fois rentrés en terres anglicanes, commence alors une autre guerre, des récits cette fois, afin de sauver son honneur et sa vie face à l'Amirauté et au grand public.
Reconstitution captivante d'un monde disparu, Les Naufragés du Wager de David Grann est un formidable roman d'aventures et une réflexion saisissante sur le sens des récits. Un grand livre par l'un des maîtres de la littérature du réel.
David Grann récidive ! Le génial auteur de La Note américaine nous embarque avec sa minutie scrupuleuse dans un périple ahurissant à travers les océans, restituant l'épopée catastrophique du Wager dans les moindres détails : humains, techniques, maritimes... ainsi que la sidérante guerre de communication qui en a découlé.
Captivant de la poupe à la proue !
Un roman d'aventure magnétique et foisonnant. À la suite de ses personnages ballotés par l'Histoire et les éléments dans des décors grandioses, Yan Lespoux nous entraîne à la recherche de la lumière dans le tumulte du monde.
Quand les empires sombrent, quand les sociétés se délitent, des brèches se créent qui permettent de s'immiscer dans les interstices de l'Histoire.
1627, sur la route des Indes, dans la fureur d'une ville assiégée, dans le dédale des marais et des dunes battues par le vent, l'aventure est en marche et trois héros ordinaires verront leur destins réunis par une tempête dantesque...
Il y a Marie sur la côte landaise. Pour échapper aux autorités qui la recherchent, elle s'est réfugiée dans une communauté de pilleurs d'épaves sous la coupe d'un homme brutal. La jeune fille à peine sortie de l'adolescence refuse pourtant de baisser la tête.
Au Brésil, il y a Diogo, orphelin engagé dans la guérilla portugaise qui tente de reprendre Salvador de Bahia aux Hollandais.
Et à Goa, il y a Fernando, engagé de force dans l'armée portugaise, qui met tout en oeuvre pour échapper à sa condition.
Entre Goa et le Médoc, Bahia et le Portugal, à travers les océans déchaînés du XVIIIème siècle qui charrient des personnages extraordinaires, ce roman d'aventure d'une densité sidérante résonne du fracas des tempêtes qui soulèvent les flots, exacerbent les passions humaines et bouleversent les âmes. Un premier roman tout simplement énorme !!!
Que se passe-t-il lorsqu'un auteur, qui a beaucoup écrit sur l'enfance, remonte le fil d'argent de sa propre enfance ?
Le Plus Court Chemin est un hommage aux proches et la tentative de revisiter avec les mots ce vaste monde d'avant les mots : les êtres, les lieux, les sentiments et les sensations propres à cette époque sur le point de disparaître, les années d'avant la cassure, d'avant l'accélération générale qui suivra la chute du mur de Berlin.
Raconter l'existence dans les paysages infinis de la campagne wallonne, dire l'amour et le manque. Car écrire, c'est poursuivre un dialogue avec tout ce qui a cessé d'être visible. Par-delà la nostalgie.
Traquant dans les creux des souvenirs, puisant au ruisseau de l'enfance, Antoine Wauters fragmente un fragile autoportrait poétique. Et, dans cet élégant entrelacs de mots et de silences qui dit la nécessité vitale de la littérature, il fait battre en écho le coeur de nos propres vies.
Essentiel !
J'aurais voulu que l'on se souvienne de moi pour autre chose que ma difformité. Si mon destin traverse le temps, c'est pourtant ce qui restera. Stop. À l'heure de trancher, une question me rend fou : qu'aurais-je fait sans elle ?
Malgré la monstruosité apparente suite au caprice d'un savant-fou, un jeune garçon arpente la France et l'Allemagne à la recherche de lui-même. Face à l'horreur tapie derrière la normalité, le membre sans parole ni censeur répond aux pulsions et questionne la culpabilité...
COUP DE COEUR POUR CE JOURNAL DU MAL-AIMÉ
Il est quand même tard pour appeler, je me rabats sur un SMS. Je dis à Nadia que je viens d'apprendre pour Alexandre et que je suis stupéfait, c'est le mot que j'emploie, il ne convient peut-être pas très bien mais j'ai du mal à trouver une formule adaptée. S'il était mort ou s'il avait subi un accident, ça viendrait facilement. On sait comment s'adresser à l'entourage des victimes, on sait quoi dire à ceux qui vont mal, à ceux qui souffrent. Mais qu'est-ce qu'on écrit à la femme d'un assassin ?
« Georgette était notre bonne, mais le mot était imprononçable ».
Georgette veille sur les rituels qui scandent la vie de la narratrice et de son frère : le bain, les repas, le lever et le coucher, les fêtes, les voyages. Elle est aussi la seule à savoir comment se débarrasser des serpents et des scorpions.
Georgette est une seconde mère. Elle est indispensable. Mais socialement, elle demeure une fille, c'est-à-dire une domestique. Telle est la contradiction présente au coeur de ce récit subtil et déchirant.
En vingt-six séquences, Dea Liane décrit la vie quotidienne d'une famille sur le modèle du film amateur tel qu'il existait encore dans les années 90. En substituant des mots à des images, elle propose une nouvelle manière de raconter - sensible, précise. Sans oublier pour autant ce qu'elle doit à son autre langue maternelle : l'arabe.
Dans toutes les histoires d'amour se rejouent les blessures de l'enfance : on guérit ou on creuse ses plaies.
Pour comprendre la nature de sa relation avec Guillaume, Clotilde Mélisse observe les souvenirs qu'elle sort de sa tête, le temps d'un voyage en train direction Heidelberg. Tandis que par la fenêtre défilent des paysages de fin du monde, Clotilde revient sur les événements saillants de son existence. La découverte de la poésie dans la bibliothèque maternelle, le féminicide parental, l'adolescence et ses pulsions suicidaires, le diagnostic posé sur sa bipolarité. Sa rencontre, dix ans plus tôt, avec Guillaume, leur lien épistolaire qui tenait de l'addiction, l'implosion de leur idylle au contact du réel.
Car Guillaume est revenu, et depuis dix-sept mois Clotilde perd la raison. Elle qui s'épanouissait au creux de son célibat voit son coeur et son âme ravagés par la résurgence de cet amour impossible. La décennie passée ne change en rien la donne : Guillaume est toujours gay, et qui plus est en couple. Aussi Clotilde espère, au gré des arrêts de gare, trouver une solution d'ici le terminus.
Prix du roman FNAC Au grand jeu du destin, Mimo a tiré les mauvaises cartes. Né pauvre, il est confié en apprentissage à un sculpteur de pierre sans envergure. Mais il a du génie entre les mains. Toutes les fées ou presque se sont penchées sur Viola Orsini. Héritière d'une famille prestigieuse, elle a passé son enfance à l'ombre d'un palais génois. Mais elle a trop d'ambition pour se résigner à la place qu'on lui assigne.
Ces deux-là n'auraient jamais dû se rencontrer. Au premier regard, ils se reconnaissent et se jurent de ne jamais se quitter. Viola et Mimo ne peuvent ni vivre ensemble, ni rester longtemps loin de l'autre. Liés par une attraction indéfectible, ils traversent des années de fureur quand l'Italie bascule dans le fascisme. Mimo prend sa revanche sur le sort, mais à quoi bon la gloire s'il doit perdre Viola ?
Un roman plein de fougue et d'éclats, habité par la grâce et la beauté.
« New York enflait de l'optimisme tapageur de ceux qui croient avoir pris de vitesse le futur ».
Wall Street traverse l'une des pires crises de son histoire. Nous sommes dans les années 1930, la Grande Dépression frappe l'Amérique de plein fouet. Un homme, néanmoins, a su faire fortune là où tous se sont effondrés. Héritier d'une famille d'industriels devenu magnat de la finance, il est l'époux aimant d'une fille d'aristocrates. Ils forment un couple que la haute société new-yorkaise rêve de côtoyer, mais préfèrent vivre à l'écart et se consacrer, lui à ses affaires, elle à sa maison et à ses oeuvres de bienfaisance.
Tout semble si parfait chez les heureux du monde... Pourtant, le vernis s'écaille, et le lecteur est pris dans un jeu de piste.
Et si cette illustre figure n'était qu'une fiction ? Et si derrière les légendes américaines se cachaient d'autres destinées plus sombres et plus mystérieuses ?
Jean-Jacques Goldman n'est pas seulement un grand nom de la chanson. Il est aussi un enfant d'immigrés juifs devenu la personnalité préférée des Français, un artiste engagé après la mort des utopies, un artisan au coeur des industries culturelles, un homme en rupture avec les codes virils. Le succès n'a affecté ni sa droiture ni son humilité.
Pour exister, Goldman a dû composer avec les règles de son temps, mais il a fini par composer lui-même l'air du temps, les chansons que les filles écoutaient dans leur chambre, les tubes sur lesquels tous les jeunes dansaient, les hymnes des générations qui se pressaient à ses concerts.
Et puis, au sommet de la gloire, l'hyperstar a choisi de se retirer. Dans la folie des réseaux sociaux, son invisibilité le rend étrangement visible. À force d'absence, et parce qu'il n'a jamais été aussi présent, Goldman est devenu un mythe.
Ce livre retrace le parcours d'un artiste exceptionnel, tout en racontant nos années Goldman.
Loin du simple exercice biographique, Ivan Jablonka poursuit son passionnant travail de socio-histoire en s'attachant à décrypter le phénomène Goldman dans toute sa complexité : l'homme (secret), le chanteur (clivant puis dépassant tous les clivages), la figure publique (plus populaire à mesure qu'il se fait plus discret).
Une manière de saisir, dans l'ombre de la guitare, les contrastes et les paradoxes de la France des années 70 à nos jours.
En levant les yeux vers le huitième étage d'une tour du XIIIe arrondissement de Paris, Agnès rejoint en pensée Boris et Tsila, ses grands-parents, et tous ceux qui vivaient autrefois dans le même immeuble. Rue du Château des Rentiers, ces Juifs originaires d'Europe centrale avaient inventé jadis une vie en communauté, un phalanstère.
Le temps a passé, mais qu'importe puisque grâce à l'imagination, on peut avoir à la fois 17, 22, 53 et 90 ans : le passé et le présent se superposent, les années se télescopent, et l'utopie vécue par Boris et Tsila devient à son tour le projet d'Agnès. Vieillir?? Oui, mais en compagnie de ceux qu'on aime.
Telle est la leçon de ce roman plein d'humour et de devinettes - à quoi ressemble le jardin d'Éden ? quelle est la recette exacte du gâteau aux noix ? qu'est-ce qu'une histoire racontée à des sourds par des muets ? -, qui nous entraîne dans un voyage vertigineux à travers les générations.
Traduction révisée
«On va faire un beau film !» Depuis que le producteur a validé ainsi son scénario, Boris est aux anges. La magnifique tragédie amoureuse qu'il a intitulée Les servitudes silencieuses verra le jour au cinéma, en noir et blanc, comme dans ses rêves les plus fous. Et tout semble décidément sourire à Boris quand il fait la rencontre d'Aurélie, une jeune femme cinéphile qui se passionne pour le projet. Pourtant le cinéma, comme l'amour, a ses aléas et ses contraintes. Du film d'auteur au navet, il n'y a parfois qu'un pas. Fabrice Caro développe ici son art de l'absurde dans un délicieux crescendo comique.
J'ai voulu raconter l'amour tel qu'il est vécu la plupart du temps par la plupart des gens : sans crise ni événement. Au gré de la vie qui passe, des printemps qui reviennent et repartent. Dans la mélancolie des choses. Il est nulle part et partout, il est dans le temps même. Les Moreau vont vivre cinquante ans côte à côte, en compagnie l'un de l'autre. C'est le bon mot : elle est sa compagne, il est son compagnon. Seule la mort les séparera, et encore ce n'est pas sûr. F. B.
Florence, 1557. Le peintre Pontormo est retrouvé assassiné au pied des fresques auxquelles il travaillait depuis onze ans. Un tableau a été maquillé. Un crime de lèse-majesté a été commis. Vasari, l'homme à tout faire du duc de Florence, est chargé de l'enquête. Pour l'assister à distance, il se tourne vers le vieux Michel-Ange exilé à Rome.
La situation exige discrétion, loyauté, sensibilité artistique et sens politique. L'Europe est une poudrière. Cosimo de Médicis doit faire face aux convoitises de sa cousine Catherine, reine de France, alliée à son vieil ennemi, le républicain Piero Strozzi. Les couvents de la ville pullulent de nostalgiques de Savonarole tandis qu'à Rome, le pape condamne les nudités de le chapelle Sixtine.
Perspective(s) est un polar historique épistolaire. Du broyeur de couleurs à la reine de France en passant par les meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, chacun des correspondants joue sa carte. Tout le monde est suspect.
Roman épistolaire, enquête criminelle, récit historique de haute volée où s'entremêlent le vrai et le faux jusqu'au vertige, mise en perspective(s) artistique éblouissante, le tout relevé de cet humour impertinent qui complète sa signature : Laurent Binet est décidément aussi rare que brillant.
VIRTUOSE !!!
« Je me suis levé de table et je me suis mis à danser la gigue : Papa a éclaté de rire, et j'aime l'entendre rire comme ça - comme un type qui écrit, qui a faim et qui est complètement fou. ».
Voici l'histoire de Pete, dix ans, et de son père dans les années cinquante à Malibu - deux écrivains, l'un en herbe, l'autre qui pour faire bouillir la marmite hésite entre un livre de recettes et une pièce de théâtre. Ils courent sur la plage, font la cuisine avec trois fois rien - l'inénarrable Riz de l'Écrivain -, se racontent des histoires et rêvent au son du phono. Le fils d'être le premier à marcher sur la Lune, le père de vivre pour écrire...
Un roman irrésistible sur la transmission, le sens de la vie, la joie d'être au monde et, plus que tout, la passion de l'écriture.
Jean-Claude Romand est un homme normal. Bon père et bon époux, il a des amis et un travail intéressant. Aux yeux de chacun, il mène une vie exemplaire. Ses photos de famille ressemblent aux vôtres : on y voit le reflet d'un monde heureux. Le 9 janvier 1993, il arme sa carabine et tue de sang-froid sa femme, ses deux enfants et ses parents. On découvre alors un imposteur qui s'est inventé une vie trompeuse. Et derrière l'imposteur, un monstre froid. À partir de ce fait divers inouï, Emmanuel Carrère retrace une existence lacunaire, cherche ce qui reste d'humanité chez Jean-Claude Romand. Plus qu'un roman, plus qu'une enquête : une énigme métaphysique.
Quand l'État recule, la forme Commune s'épanouit. Ce fut le cas à Paris en 1871 comme lors de ses apparitions plus récentes, en France et ailleurs. Les luttes territoriales contemporaines, comme la ZAD de Notre-Dame-Des-Landes ou les occupations de chantiers de construction de pipelines en Amérique du Nord, ont remis à l'ordre du jour des formes d'appropriation de l'espace social. Elles ont façonné de nouvelles manières politiques d'habiter qui agissent pour interrompre la destruction de notre environnement. Mais elles ont également modifié notre perception du passé récent et donné de nouveaux noms à ce que nous voyons aujourd'hui, aiguisant notre compréhension du présent. Les luttes au long cours pour la terre des années 1960 et 1970, comme le Sanrizuka au Japon ou e Larzac, apparaissent désormais pour ce qu'elles sont : des batailles déterminantes de notre époque. Pour Kristin Ross, les processus pragmatiques et non accumulatifs qui fondent l'existence concrète de la vie de la commune - défense, subsistance, appropriation, composition et complémentarité des pratiques, solidarité dans la diversité - constituent des éléments cruciaux de ce que Marx appelait « la forme politique de l'émancipation sociale » et que Kropotkine considérait comme la condition nécessaire de la révolution et de son accomplissement.
Automne 2015. Raphaël Krafft, journaliste indépendant, est à la frontière franco-italienne des Alpes-Maritimes, entre Menton et Vintimille. Il réalise un reportage sur les exilés bloqués là dans l'attente de passer en France pour demander l'asile ou de continuer vers un autre pays.
Il rencontre tour à tour des militants, des policiers, des fonctionnaires, une avocate spécialiste des Droits de l'homme pour constater le drame de la situation. Et décide, par un acte de désobéissance civile, d'aider deux Soudanais, « Satellite » et Adeel, à franchir la frontière. À pied, Raphaël Krafft, son ami Thomas et les deux réfugiés entreprennent une ascension dans le parc du Mercantour, jusqu'au col de Fenestre, qui culmine à 2 474 mètres, pour atteindre la France.
Je implore toi s'il vous plaît dormir couloir. Ces mots, Mirjet ne me les dit pas. Il les écrit en albanais sur l'ordinateur et c'est Google Traduction qui me les dit. C'est plutôt marrant d'habitude, les traductions déformées par le logiciel. Là, ce n'est pas drôle du tout. Mirjet dit avoir dix-sept ans, mais tant qu'il n'est pas reconnu mineur isolé étranger, je ne peux pas lui trouver un hébergement.
Durant un an et demi, Rozenn Le Berre a été chargée d'accueillir de jeunes exilés arrivés en France sans leurs parents. De cette expérience, elle a tiré un récit de haute intensité littéraire où résonnent deux voix. La première, la sienne, est con?née à l'espace de son bureau où se présentent chaque jour des jeunes qui traînent des valises de souvenirs acides, mais que la fureur de vivre maintient debout. La seconde relate le voyage éprouvant de Souley, qui a décidé de faire l'aventure et doit arriver en France avant ses dix-huit ans.
Ce livre nous emmène à la rencontre de jeunes ?lles et garçons malmenés par l'exil et le labyrinthe administratif français, mais qui parviennent petit à petit à se reconstruire, à sourire, à être pénibles et idiots comme des adolescents. À vivre au lieu de survivre.
Sa mère, c'est trop haut, je fais une dépression, là. Comme nous tous, Jordan est épuisé. Au loin apparaît enfin le refuge où nous allons passer la nuit. Nous nous engageons en silence dans un ultime effort, nous qui ne sommes pas des habitués de la randonnée.
Je marche depuis plusieurs jours avec des éducateurs et des jeunes placés dans un foyer de la protection judiciaire de la jeunesse, parfois en alternative à l'incarcération.
Il y a Lyam, le grand taiseux agile comme un chamois, Omar, celui qui rêve de biceps surdimensionnés et d'oublier quelques nuits de sa vie, et Jordan, qui lutte chaque jour pour ne pas s'écrouler.
Arpenter les grands espaces, c'est échapper un temps à ce lieu où ils cohabitent, dans le nord de la France, avec d'autres adolescents. Des jeunes aux vies orageuses, remplies de plus de déceptions, de ruptures et de violences qu'une personne peut absorber en une vie entière. Tous les jours, des éducateurs et éducatrices les aident à ne pas chuter.
D'une écriture précise, fine et sensible, l'autrice propose une plongée en apnée dans un foyer pour adolescents dits délinquants. Et ne nous y trompons pas : ces adolescences sur la crête racontent aussi quelque chose de nous, du passage fragile à l'âge adulte. Et de ce qui se passe quand on dérape en grandissant.