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Cet essai atypique se présente sous la forme d'une suite de courts textes, comme autant de tableaux urbains arrachés de la fenêtre d'une voiture. Véritable non-ville, Zéropolis, Las Vegas annonce le futur de nos métropoles. Mais l'auteur sait également être sensible à la poésie des motels et la beauté des cimetières d'enseignes au néon ; sa «méthode», toute de finesse, part d'observations de détails précis pour en extraire la dimension sociologique, politique et philosophique.
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George Orwell est connu pour avoir écrit 1984 ou La Ferme des animaux, il l'est moins pour la réflexion qu'il a menée sur la condition des gens ordinaires. Bruce Bégout rend ici hommage à l'humanisme d'Orwell. Il y a, dans sa pensée, la combinaison d'une lucidité pessimiste et d'une joie de vivre. En parcourant son oeuvre, il tente de définir la notion de «décence ordinaire», ce «sens moral inné» qui incite les gens simples à bien agir.
Il dénonce, entre autres, l'indécence extraordinaire des intellectuels qui s'affilient au pouvoir et les dérives d'un socialisme coupé du quotidien. Révélant l'importance qu'occupe la question du monde de la vie quotidienne chez Orwell, Bruce Bégout nous propose une lecture nouvelle de son oeuvre et met en valeur la finesse de son jugement politique.
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L'île éveille d'ordinaire tout l'imaginaire des fictions utopiques. Or, ici, elle devient le lieu idéal du ParK, condensé insolite de toutes les formes de parcs imaginés par les hommes. Le cerveau du projet, Litch, y vit dans une tour d'ivoire. Il est le théoricien de ce qu'il nomme la neuro-architecture, fondée sur les ressorts les plus subtils de la psychologie humaine. Le ParK est un laboratoire à ciel ouvert où s'expérimentent, à la vue de tous, les pratiques futures et coercitives du contrôle social. À la manière des hommes qui y vivent, prisonniers de leur cadre de vie, le lecteur explore à son corps défendant ce lieu étrange, se heurte à l'insolite et à l'effroyable. Il s'invite à l'une des tables de jeux de l'hôtel casino Todeskamp 1, le bruit des machines à sous se mêlant au couinement plaintif de sommiers. Il pénètre les Quartiers des solitaires ou se retrouve, dans le Conservatoire des Cris, à entendre les infinies nuances de la souffrance humaine... Bien qu'élu, l'âme de cet aventurier d'un genre nouveau est mise à mal malgré les plus beaux atours de l'enchantement. Une critique irrévocable des conditions de refoulement de l'angoisse. Un monde de divertissement poussé à son extrême, revers cynique des industries du spectacle actuelles. Une visite guidée effroyable, qui renouvelle le roman d'anticipation et tient en haleine son impétrant.
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Lieu Commun constitue le deuxième volet d'une trilogie entamée avec Zéropolis, vaste entreprise d'archéologie des significations du monde quotidien et urbain. L'essai de Bruce Bégout parvient à restituer la poésie de cet élément essentiel de l'imaginaire contemporain qu'est le motel, tout en en décortiquant le mythe. Loin de n'être qu'un échantillon de l'american way of life, le motel concrétise en effet de nouvelles formes de vie urbaine où la mobilité, l'errance et la pauvreté prennent une place prépondérante. À la croisée de l'économie, de l'architecture et de la fiction, ce qui se dévoile ici, c'est que cette forme particulière d'architecture a donné naissance à un homme du motel, dont les comportements annoncent de nouvelles formes de vie.
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La philosophie et le quotidien entretiennent depuis toujours des rapports difficiles. Ce livre tente de comprendre les raisons de ce divorce historique, mais surtout de proposer une véritable compréhension philosophique du monde quotidien qui dépasse à la fois sa critique méprisante et son apologie naïve. Depuis l'époque des Lumières, la philosophie a eu pour ambition première de redescendre du ciel à la terre, c'est-à-dire de prendre le monde concret pour objet de ses recherches et de ses projets de réforme. Malheureusement, depuis deux siècles, ce voeu d'un rapprochement avec le monde de la vie quotidienne n'a pas tellement été suivi d'effets. C'est pourquoi il nous faut redécouvrir le quotidien, au-delà des images éculées qu'il véhicule lui-même (la grisaille, la banalité, la trivialité), pour retrouver sous sa surface en apparence monotone et superficielle l'énigme même de la condition humaine. L'ambition de ce livre est donc de dévoiler l'essence cachée de la quotidienneté, ce qui fait que toute vie humaine est, qu'elle le veuille ou non, toujours aussi une vie quotidienne.
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C'est à l'Institut médico-légal, surnommé L'Hôtel, que se croisent les personnages interlopes de ce roman noir. Le narrateur, directeur de ce lieu déroutant, décrit la lente dépravation de son institution.
Suite à sa rencontre avec Valère, producteur de films pornographiques, il accepte une étrange proposition :
Que l'Institut abrite un club clandestin... Dehors, un mal jaune se propage.
«Cloaque nauséabond», l'Institut devient l'antre d'une véritable fête des morts. La succession de chapitres courts et nerveux dit l'ascension irrémédiable du récit vers une apothéose de la folie. Aussi affutée que le scalpel du narrateur qui dissèque les cadavres, la plume de Bruce Bégout nous entraîne aux confins d'une extase ultime, d'une décomposition totale : celle des corps, des êtres et du récit.
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Révéler ce que l'extraordinaire a d'ordinaire : voici ce qui relierait les nouvelles de ce recueil. Chacune s'attache à des personnages singuliers, souvent seuls et désarmés, aux prises avec l'époque dans ce qu'elle a de plus excessif et de violent. Portraits de maniaques, de désaxés, d'originaux qui luttent contre "le dispositif", ainsi qu'ils nomment la combinaison d'airain de la marchandise, de la technologie et du spectacle. Bruce Bégout procède à l'inverse du film d'horreur : il désigne ce que l'insane lui-même a d'ordinaire. D'où les situations paradoxales ici mises en scène. Dans Signes particuliers : néant, un architecte conçoit, à la solde de l'État, un édifice destiné à aider les gens à se suicider. Dans Le Compteur des féminicides, suite à une injonction ministérielle, un homme dénombre les femmes tuées dans les séries, films ou vidéos. Certaines nouvelles nous plongent dans le malaise quand d'autres flirtent avec le fantastique.
Bégout invente ici un ton, qu'il qualifie de "post-gothique". Dans ces récits, l'effroi, le mal, la terreur n'expriment pas seulement la fragilité psychologique des personnages face aux forces des ténèbres, mais aussi le potentiel de nuisance de l'époque. Ses vampires prennent la forme d'appareils, de produits, d'architectures mais aussi de représentations sociales, d'injonctions et de tics de langage. Bruce Bégout traque les démons non pas dans les châteaux hantés, les ruines, les églises, les forêts et les cimetières mais dans les parkings, les centres commerciaux, les banlieues pavillonnaires, la suburbia mondiale. Mais qu'en est-il de la résistance, volontaire ou non, de ces personnages dans le contexte morbide qui les broie ? Bégout manie l'humour noir, qui peut parfois triompher du réel. La raison reprendra-t-elle néanmoins ses droits ? Parviendra-t-elle à expliquer la part de fiction et de non-sens qui régit le quotidien ?
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" quelle qu'elle soit, l'expérience d'une nuit passée dans un motel oscille sans cesse entre la sécurité et l'insécurité, entre la volonté de se recroqueviller et celle de s'exposer, de rester dans son lit et d'écouter aux portes, voire de les ouvrir pour faire l'expérience de l'intimité interdite.
On s'y sent à la fois protégé par les cloisons blanches qui nous entourent et vaguement inquiété par l'environnement souvent désolé que l'on devine au-delà. on voudrait se soustraire au monde et l'on sent pourtant qu'il pourrait, un moment ou à un autre, frapper à la porte. " bruce bégout