Le Tsigane Django Reinhardt, musicien de jazz, a connu ses plus grandes heures de gloire sous l'Occupation. Un succès à l'égal de celui de Maurice Chevalier et de Charles Trenet, aussi bien à Paris et dans la France occupée, qu'en Belgique sous administration militaire allemande. Gérard Régnier montre que l'image d'un Django traqué en tant que Tsigane par les occupants nazis relève de la légende. Les officiers allemands, connaisseurs et amateurs de jazz, se pressaient, aussi bien pour l'écouter en concert à la salle Pleyel, que dans les cabarets comme Le Nid. En Belgique, Django fait salle comble au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles et la foule se presse pour l'apercevoir lors de sa réception au grand quotidien Le Soir. Charles Delaunay, dans son label Swing, enregistre Django, et ses disques connaissent le plus grand succès. On siffle Nuages dans les rues de Paris, Bruxelles et Berlin.
Gérard Régnier raconte son exode de juin 1940 en historien, en le situant avec précision dans cette période qui apparaît avec le recul comme la plus sombre de notre histoire nationale : les « années noires ». Il décrit minutieusement la situation internationale au cours des années 1930, le recul des Alliés français et anglais face aux provocations d'Hitler et à sa « diplomatie du bluff », la confiance irraisonnée des responsables politiques timorés et des militaires incapables.
Son récit nous le montre à 6 ans, le 11 juin 1940, avec sa mère veuve et son frère de 12 ans, traversant l'estuaire de la Seine, du Havre à Trouville-sur-Mer, sur un bateau de pêcheurs, sous le mitraillage des avions Stukas allemands. En 1941 et en 1942, au Havre, pendant les bombardements, c'est une succession de nuits passées dans une cave minuscule. Évacué à Lillebonne en 1943, il voit un jour son jeune instituteur, dans la rue, en uniforme milicien. Il apprendra longtemps après la guerre que, appartenant à un groupe de lycéens résistants du Havre, il avait été arrêté en 1941 par la police allemande et emprisonné six mois à la prison de la Santé.
Et, « privilège » d'un Havrais, l'auteur connaîtra un second exode, quatre ans plus tard, en août 1944, parcourant par étapes, entièrement à pied cette fois, les quarante kilomètres qui séparent Le Havre de Lillebonne. Les femmes tondues sur la place de la mairie, le jour de leur arrivée, est un souvenir indéfectible.
Plongé prématurément en observateur attentif dans le monde des adultes, les conditions exceptionnelles de cette période lui permettent de les apprécier dans leur comportement. Mais, protégé par une mère admirable, profitant du moindre petit bonheur au quotidien, il tient à montrer que pour l'enfant, les circonstances les plus dramatiques sont suivies très souvent de moments de joie, témoins de l'aptitude de l'enfance à la résilience.
Le zazou est, d'abord, une jeunesse, artistiquement résumable en un mot : swing. Sa présentation habituelle le rend sympathique : fantaisie vestimentaire et chevelure abondante, amour du jazz et de tout ce qui vient des États-Unis, opposition de fait à la Révolution nationale du maréchal Pétain. Boris Vian et sa femme Michelle trônent au milieu de ces jeunes gens. Mais dans un chapitre « Zazous » de sa première oeuvre, Cent sonnets, il se montre sans pitié à leur égard, décrivant leur ignorance en matière de jazz. Etendue aux zazous belges, praguois ou allemands, l'étude montre que les tenants de la Révolution nationale et de la Collaboration ont contribué à attribuer, de fait, aux zazous, un « brevet » de résistance, en mettant sans cesse en exergue leur rejet de l'encadrement idéologique.
Le jazz, considéré par les nazis comme une musique "négro-judéo-anglo-saxonne" a connu, paradoxalement, un grand succès sous l'Occupation. A partir d'une étude approfondie de l'histoire du jazz en Allemagne, l'auteur explique la présence de militaires allemands dans les salles de concerts, cabarets. Il présente la situation du jazz en Belgique, à Paris et dans les Hots Clubs de province.