Le 21 décembre 1914, Freud écrit qu'il prépare « une théorie de la névrose avec des chapitres sur les destins de pulsions, le refoulement et l'inconscient ». Il commence en mars 1915 à composer ces trois essais qu'il présente, dans la lettre du 1er avril à Lou Andreas-Salomé, comme « une sorte de synthèse psychologique de ses conceptions antérieures ».
L'interprétation du rêve introduit à la fois une nouvelle méthode et une nouvelle théorie. La méthode est celle de l'analyse et des associations ; elle décompose le contenu de rêve manifeste en autant d'éléments ou constituants du rêve pour retrouver, en suivant les cheminements de pensée du rêveur, les pensées de rêve latentes. " L'interprétation des rêves est la voie royale qui mène à la connaissance de l'inconscient de la vie psychique. " (S. Freud) Direction scientifique : Jean Laplanche. Direction de la publication : Pierre Cotet. Notices, notes et variantes par Alain Rauzy. Traduit par Janine Altounian, Pierre Cotet, René Lainé, Alain Rauzy, François Robert. Préface de François Robert.
Banale, singulière, tragique, ridicule, violente, insidieuse, amoureuse, fraternelle... Les voix de la jalousie se font entendre avec la régularité des composantes essentielles de la vie psychique. Celles qui associent les intérêts du moi et de l'objet à l'aune des pulsions et de leurs destins, celles qui construisent les identifications et fomentent les conflits, celles qui composent entre principe de plaisir et de déplaisir, celles qui régentent la réalité interne et la réalité externe dans les relations à l'autre. C'est sans doute la part de passion exaltée par la jalousie qui lui donne sa puissance inspiratrice depuis la nuit des temps. C'est peut-être aussi parce que, au-delà de la vie amoureuse qui reste son lieu d'émergence le plus manifeste, au-delà de l'intimité de la psyché individuelle, elle peut diriger, souterrainement, l'ordre du monde. Les auteurs de cet ouvrage s'attachent à ses entremêlements dans des voies à la fois singulières et diverses, ouvrant des perspectives nouvelles qui permettent, au-delà du tourment, d'en saisir aussi les bienfaits.
" Au-delà d'une simple recension des " vocables " psychanalytiques, ce Vocabulaire propose une réflexion, allant du plus simple au plus complexe, sur l'ensemble des concepts que Freud et d'autres à sa suite ont progressivement élaborés, pour rendre compte des découvertes de la psychanalyse. Notre commentaire a tenté, à propos des notions principales qu'il rencontrait, d'en lever ou tout au moins d'en éclairer les ambiguïtés, d'en expliciter les éventuelles contradictions. Il est rare que celles-ci ne débouchent pas sur une problématique susceptible d'être retrouvée dans l'expérience même. " (J. Laplanche, J.-B. Pontalis).
Ce Vocabulaire, fut publié pour la première fois en 1967 dans une version reliée, puis repris dans la collection Quadrige et son succès, tant en France (plus de 100 000 exemplaires vendus) qu'à l'étranger (des éditions en dix-sept langues, de l'anglais au japonais, du suédois au turc et à l'arabe) ne s'est jamais démenti, preuve de la pertinence de ce travail " encore bien présent, même s'il serait améliorable... Il ne s'agissait pas de faire le tour de Freud mais de lancer des coups de sonde, d'approfondissement. Le contraire même d'une mise en manuel : une mise en problème " selon les termes de J. Laplanche.
Sans doute y a-t-il autant de façons d'intriquer Grande et petite histoires qu'il y a de vies singulières. D'abord parce que les « grandes » histoires, les histoires collectives, ne véhiculent pas les mêmes sens et non-sens. Pour s'en tenir à celles que ce livre évoque : l'assassinat d'un père par la Milice, l'exil d'un réfugié Rohingya fuyant le massacre, la vie analytique sur fond de terreur en Colombie, la vie sauvée loin de la dictature de Poutine... L'intrication des deux histoires est l'objet de cet ouvrage, en même temps qu'une interrogation sur le travail de la psychanalyse quand elle se trouve ainsi confrontée à la rencontre violente de la réalité du monde et de la réalité psychique.
« La recherche ici entreprise implique donc le projet délibéré d'être à la fois historique et critique, dans la mesure où il s'agit, hors de toute intention prescriptive, de déterminer les conditions de possibilité de l'expérience médicale telle que l'époque moderne l'a connue. Une fois pour toutes, ce livre n'est pas écrit pour une médecine contre une autre, ou contre la médecine pour une absence de médecine. Ici comme ailleurs, il s'agit d'une étude qui essaie de dégager dans l'épaisseur du discours les conditions de son histoire. » (Michel Foucault) Naissance de la clinique constitue aussi, à travers une analyse historique et critique de la constitution du sujet, le malade, tel qu'il peut devenir objet de connaissance, la naissance d'une oeuvre philosophique qui va marquer durablement la pensée contemporaine internationale.
Dernier grand texte métapsychologique de Freud, venant à la suite d'Au-delà du principe de plaisir, Le moi et le ça est le livre de la seconde topique, où sont introduites deux nouvelles figures : le ça (terme emprunté à Groddeck) et le sur-moi (l'autre nom de l'idéal du moi). Cette seconde topique prolonge la première (Conscient, Préconscient, Inconscient) ; le moi, " être de surface ", lié au système Perception-Conscience et tourné vers le monde extérieur, est aussi un " être de frontière ", confluant avec le ça (pulsionnel, inconscient, mais aussi héréditaire) ; de même, le sur-moi, instance morale et critique, est aussi, en tant qu'héritier du complexe d'oedipe, plus proche du ça que du moi. À cette nouvelle partition de l'appareil psychique Freud greffe, plus qu'il n'intègre, le second dualisme pulsionnel (Eros et pulsion de mort).
En suivant les chemins parcourus par son expérience des lieux de l'analyse, l'auteur, qui se refuse à rédiger un traité d'éthique analytique et pour qui la morale n'ouvre pas de portes freudiennes, rencontre des situations vivantes dans lesquelles, le plus souvent, pour demeurer créatif, il côtoie les limites de ce qu'il pense être autorisé. En d'autres termes, il explore les conséquences de la vie amoureuse pour la pensée de l'analyse et la pensée tout court.
On sait, depuis Freud et sa référence à saint Paul, que « si [on n'a] pas l'amour [...] », on n'est que bruit et vent. La pensée est en effet une matière amoureuse, sexuelle, dense, irriguée par la libido, et soumise aux déviations.
Question : le psychanalyste peut-il évaluer les problèmes éthiques - théoriques comme pratiques - avec une pensée dont la source est « perverse polymorphe » ?
Réponse : oui.
Une première ébauche de cet essai fut écrite entre mars et mai 1919. Freud avait travaillé en même temps à " L'inquiétant, dans lequel apparaissait déjà le terme de " contrainte de répétition ". L'essai fut achevé en juillet 1920 et publié en décembre sous la forme d'un volume de l'Internationaler psychoanalytischer Verlag. Ce livre occupe une place essentielle parmi les grands écrits métapsychologiques de Freud, annonçant les oeuvres de la dernière période et particulièrement Le moi et le ça de 1923. Il est également dans la continuité des " Formulations sur les deux principes de l'advenir psychique ", de " Pour introduire le narcissisme " et de " Pulsions et destins de pulsions ". Sigmund FREUD. Direction scientifique : Jean Laplanche. Direction de la publication : André Bourguignon, Pierre Cotet. Notices, notes et variantes par Alain Rauzy. Traduit par Janine Altounian, André Bourguignon, Pierre Cotet et Alain Rauzy. Préface de Jean Laplanche.
Hériter, c'est prendre sa place dans une généalogie qui, même si elle apparaît naturelle, est toujours symbolique puisqu'elle doit être reconnue pour pouvoir bénéficier du legs. Hériter, c'est également investir la place du disparu, la perpétuer par-delà les générations, que celui-ci ait été un proche parent, un lointain ascendant ou encore un bienfaiteur. C'est le temps de la succession, celui où souvent, dans la maison familiale désertée, la voix des parents ne résonne plus. C'est l'impudeur inévitable des inventaires et des partages.
Dans un style alerte, en s'appuyant sur sa clinique et sur de nombreux exemples littéraires ou cinématographiques, ainsi que sur des faits divers, Patrick Avrane nous montre que les partages difficiles relèvent moins du notaire que du psychanalyste quand il est question d'envie, de déception, d'amour ou de haine.
L'établissement de concordances entre la névrose individuelle et les interdits
religieux et sociaux préoccupait Freud depuis longtemps. L'idée d'un travail
sur la psychologie des religions n'a pas encore abouti en 1911, mais dans une
lettre à Jung du 12 février, Freud laisse entendre qu'une « assez vaste
synthèse » est en gestation. Le projet se précise suffisamment pour que, le 11
août, il écrive à Ferenczi : « Je suis tout entier Totem et tabou. » Se
référant à Totem et tabou en 1914 dans « Contribution à l'histoire du mouvement
psychanalytique », Freud se demandait si ses conclusions résisteraient à la
critique. Il finit par tenir ce livre pour l'un de ses plus importants. Il
attachait une valeur particulière au quatrième essai, composé, disait-il, avec
la même force de conviction que L'interprétation du rêve. Il déclara même à
James Strachey qu'il considérait ce quatrième essai comme « son oeuvre la mieux
écrite ». Direction scientifique : Jean Laplanche. Direction de la publication
: André Bourguignon, Pierre Cotet. Notices, notes et variantes par Alain Rauzy.
Traduit par Janine Altounian, André Bourguignon, Pierre Cotet et Alain Rauzy.
Préface de Christophe Dejours.
« Le symptôme serait indice et substitut d'une satisfaction pulsionnelle qui n'a pas eu lieu, un succès du processus de refoulement. » Prenant appui sur la théorie de l'appareil psychique développée dans Le moi et le ça , Freud retravaille des concepts présents dès l'origine comme la défense et le refoulement. Une place importante est donnée à la névrose de contrainte et deux histoires de phobie sont réexaminées : Le petit Hans et L'homme aux loups. Une nouvelle configuration se fait jour, selon laquelle c'est l'angoisse qui provoque le refoulement, au lieu qu'elle soit produite par lui. En dernière analyse, c'est le trauma de la naissance qui constitue le prototype de toute situation ultérieure de danger ; l'angoisse réapparaîtra chaque fois qu'il y a un danger majeur sous forme d'angoisse de la perte d'objet.
Que peut nous dire la psychanalyse contemporaine de la question de la distance, et tout particulièrement des enjeux de variations de distance dans la relation à soi-même ou à l'objet, notamment à l'objet « analyste » ? La distance est une notion qui peut ainsi nous permettre de remettre au travail la question de l'intrapsychique et de l'intersubjectif. Une lecture élargie de Freud, et en particulier Psychologie des masses et analyse du Moi (1921), nous invite à entendre ses allers-retours entre une conception purement intrapsychique de l'appareil psychique et une conception où l'objet, voire l'environnement, ont une place essentielle dans la construction psychique interne. Freud se réfère à la parabole des porcs-épics de Schopenhauer et écrit : « Nous nous figurons bien comment les hommes, en général, se comportent affectivement les uns envers les autres. D'après le célèbre apologue Schopenhauer des porcs-épics transis de froid, aucun ne supporte de l'autre un rapprochement trop intime. » Il montre ainsi sa préoccupation pour les enjeux d'écart, de distance, de rapprochement et d'éloignement entre les individus... En effet, deux souffrances menacent le sujet humain : trop près/trop loin ; trop proche/trop distant ; intrusif/absent ; trop chaud/trop froid... Ces polarités parlent implicitement de ce qui peut mettre en péril fondamentalement la vie psychique. Ce volume se propose d'en explorer les énigmes et le sens, mais aussi de montrer la mise au travail de ces questions dans le processus analytique.
Gradiva : ein pompejanisches Phantasiestück avait été publié en 1903 par Wilhelm Jensen (1837-1911), auteur de nouvelles fantastiques et de romans historiques. L'étude de Freud parut en mai 1907, inaugurant la série des Schriften zur angewandten Seelenkunde, dont elle constituait le premier cahier.
Ce fut sa première analyse approfondie d'une oeuvre littéraire, si l'on excepte son commentaire sur La Justicière de Conrad Ferdinand Meyer et ses notations sur Oedipe Roi et Hamlet. En 1925, il confirmera qu'il a pu, en s'appuyant sur la nouvelle de Jensen, " mettre en évidence que les rêves nés de la fiction poétique autorisent les mêmes interprétations que ceux qui sont réels, que sont donc à l'oeuvre dans la production du poète les mécanismes de l'inconscient que nous connaissons à partir du travail de rêve ". Sigmund FREUD. Direction scientifique : Jean Laplanche. Direction de la publication : Pierre Cotet.
Notices, notes et variantes par Alain Rauzy. Traduction par Janine Altounian, Pierre Cotet, Pascale Haller, Alain Rauzy et Christophe Jouanlanne. Préface de Christophe Jouanlanne.
Les textes constituant ce volume ont été choisis par Daniel Lagache (1953). C'est dans la nouvelle traduction des Oeuvres complètes de Freud aux PUF, sous la direction de Jean Laplanche, qu'est proposée l'édition d'aujourd'hui. On y trouvera une somme impressionnante d'indications, recommandations, principes et règles formulés par Freud sur une période de quinze ans entre 1904 et 1919. Ce florilège a l'avantage d'une grande cohérence, non seulement quant aux préoccupations de Freud à cette époque vis-à-vis de la pratique du métier de psychanalyste, mais aussi par rapport au cadre théorique.
Ce volume aborde les différentes facettes de la notion de désillusion, dans le champ psychanalytique bien sûr, sous les prismes de l'individuel, du social et du civilisationnel. Selon la prédominance des références historiques, théoriques ou cliniques, il s'agit de démontrer le rôle fondamental de la désillusion, ainsi que ses aléas dans la construction du psychisme humain, dans la dynamique de la cure, et plus largement dans ses effets sur les mouvements qui animent la société, c'est-à-dire son impact sur le travail de civilisation et de culture.
Construire un livre rassemblant les articles les plus représentatifs de la pensée de Françoise Coblence était plus qu'un hommage : une évidence, du fait de la profondeur et de la diversité de ses textes, jamais réunis jusque-là.
Les thèmes qu'elle a examinés sous un prisme psychanalytique (rêve, pensée en séance, pulsions, affects...) sont aussi nombreux que les outils conceptuels auxquels elle a eu recours pour discuter et éclairer l'épistémologie psychanalytique, qu'ils relèvent de l'esthétique (littérature et poésie, image, musique, question de la forme en général) ou d'autres domaines de la philosophie (phénoménologie, politique, éthique...), sans oublier la perspective historique toujours présente. Ainsi, plutôt que de les regrouper en fonction d'une proximité thématique, les directeurs ont pris le parti de les faire se succéder par ordre chronologique de publication, de 1993 à 2020.
« J'ai succombé comme tant d'autres à l'attraction de cet homme grand et énigmatique... » C'est peut-être là ce qui explique le mieux pourquoi Meyer Schapiro ne reproche pas à Freud de construire une figure rêvée de Léonard. L'énigme et l'unique faisceau des hypothèses par quoi Freud pense l'avoir résolue peuvent bien exposer le livre à la critique d'être un « roman psychanalytique », mais le portrait n'est en rien le fruit d'un rêve ou d'un mythe. Laissons à Freud le soin de conclure : « Ne peut-on pas cependant être choqué par les résultats d'une investigation qui accorde aux hasards de la constellation parentale une influence si décisive sur le destin d'un être humain [...] ? Je crois qu'on n'en a pas le droit ; tenir le hasard pour indigne de décider de notre destin, ce n'est rien d'autre qu'une rechute dans la vision du monde pieuse, dont Léonard luimême prépara le surmontement en écrivant que le soleil ne se meut pas. »
Sur la Psychopathologie de la vie quotidienne est un des ouvrages majeurs dans l'édification théorique de la psychanalyse par Freud. Dans l'ordre chronologique (1901), mais peut-être aussi dans l'ordre d'importance, il vient en deuxième après L'interprétation du rêve (1900) pour construire les bases d'une théorie de l'inconscient. Freud y traite des « troubles fonctionnels psychiques » : oublis de noms, déformations de souvenirs, lapsus, opérations manquées, superstitions, etc. C'est donc l'un des textes fondateurs de la psychanalyse qui est ici mis à disposition pour la première fois en format poche dans la traduction des OCF-P dirigée par Jean Laplanche.