"Les études proposées dans ce volume contribuent à une histoire mondiale du travail libérée de l'eurocentrisme et du nationalisme méthodologique. En utilisant la littérature de diverses régions, époques et disciplines, le livre fournit des arguments et des outils conceptuels pour une interprétation différente de l'histoire - une histoire du travail qui intègre l'histoire de l'esclavage et du travail sous contrat, et qui accorde une attention sérieuse aux développements divergents, mais interconnectés, dans différentes parties du monde. Les questions suivantes sont centrales :
- Quelle est la nature de la classe ouvrière mondiale, sur laquelle se concentre l'histoire mondiale du travail ? Comment pouvons-nous définir et délimiter cette classe, et quels facteurs déterminent sa composition ?
- Quelles formes d'action collective cette classe ouvrière a-t-elle développées au fil du temps, et quelle est la logique de ce développement ?
- Que pouvons-nous apprendre des disciplines voisines ? Quels sont les points de vue des anthropologues, des sociologues et des autres spécialistes des sciences sociales qui sont utiles au développement de l'histoire mondiale du travail ?"
La logique du flou des accommodements de l'habitus sur le terrain kabyle cher à Bourdieu a fortement inspiré ses analyses des logiques plurielles et hybrides du travail symbolique. Au-delà des débats suscités par les tautologies de l'habitus bourdieusien et les controverses sur sa reproduction ou son inventivité, André Mary revient sur la pensée dialectique et dialogique qui est à l'oeuvre dans le travail de l'habitus, et sur le rôle des métaphores dans l'imagination sociologique. La lecture synthétique et pédagogique insiste sur les tensions et les ambivalences du paradigme et entend rendre justice à l'exigence de réflexivité théorique et pratique d'une pensée novatrice.
"Le pentecôtisme et les courants charismatiques qui en sont issus ont fait l'objet ces dernières décennies de nombreuses publications, le plus souvent sous la forme d'enquêtes anthropologiques. Il manquait une synthèse plus systématique, des clés de lecture théoriques permettant de cerner - au-delà de la grande diversité de ses expressions locales - les principales caractéristiques sociologiques de ce phénomène religieux. Ce livre s'appuie sur une revue de la littérature disponible et sur des recherches personnelles conduites ces quinze dernières années pour éclairer les principaux enjeux liés à la compréhension du pentecôtisme en sciences sociales.
Quelles sont les origines du pentecôtisme et comment faire la part entre le récit légendaire forgé par les pentecôtistes eux-mêmes et la réalité historique ? Comment s'opère la conversion pentecôtiste, quelle place occupe l'institution dans ce travail de transformation des existences personnelles et que recouvre exactement l'expérience pentecôtiste de la « guérison » ? Quel rôle y jouent les émotions ? Quelles relations les différents courants du pentecôtisme entretiennent-ils avec la globalisation et les cultures locales ? Et en quoi le pentecôtisme est-il aussi un acteur politique ?
L'ambition de ce livre est de faire du pentecôtisme un objet sociologique, susceptible d'éclairer les évolutions contemporaines des rapports entre autonomie individuelle, institution, autorité et engagement."
En dépassant le clivage établi entre nature et culture ainsi que les oppositions hiérarchiques entre rituels "barbares d'un autre âge" et actes médicaux ou chirurgicaux "civilisés et progressistes", ce livre a l'audace de mettre en perspective de façon inédite des formes de chirurgie sexuelles diverses comme celle de l'implant cochléaire pour les sourds, dans une approche comparée qui unit anthropologie, psychanalyse, études de genre et études visuelles.
Cette perspective comparatiste permet de dépasser le grand partage ethnocentrique entre " nous " et " les autres " afin de poser la question plus générale de l'aliénation du corps féminin, aliénation à laquelle de nombreux actes médicaux ressortant de la chirurgie esthétique ou réparatrice participent.
Comme le montre cet ouvrage, le corps n'est pas seulement marqueur d'une identité, notamment sexuée, mais possède un pouvoir transformateur dont l'expression de "transformation corporelle" rend compte. Dans la mesure où le corps agit sur l'identité, le concept de " corps-identité " signale le rôle fondamental que joue l'ordre du corporel. Si les rituels modifient le statut de la personne, il en est de même des chirurgies, attestant que le corps/identité est fondamentalement en devenir et non donné une fois pour toutes, le vieillissement, processus inéluctable, étant à cet égard paradigmatique des transformations corporelles. L'acte chirurgical, non dénué de souffrance, porte en soi l'avènement d'un renouveau, le geste même de couper qu'implique toute chirurgie renvoie fantasmatiquement à la perspective de rompre avec le cours de son existence afin de devenir " ce qu'on croit avoir toujours été et qu'on a toujours voulu être ". L'individu cherchant par la chirurgie à renaître et à se voir restituer son corps originel, on peut parler de " mélancolie du corps ", concept qui fait écho et subsume celui de " mélancolie du genre " employé par Judith Butler.
Pourquoi les projets de développement, les interventions des ONG ou les politiques publiques nationales sont-ils tous soumis à d'importants écarts entre ce qui était prévu et ce qui se passe effectivement ? Cet ouvrage apporte une réponse documentée à ce " problème des écarts ". Les politiques publiques standardisées, telles les politiques de développement omniprésentes en Afrique, méconnaissent les contextes dans lesquels elles sont mises en oeuvre.
Dans cette confrontation, les acteurs locaux jouent un rôle majeur. Les multiples stratégies de contournement des directives et protocoles officiels suivent des " normes pratiques " implicites ignorées des experts internationaux, mais que l'observation du terrain peut mettre en évidence. C'est un phénomène qui va au-delà du développement : tout se passe comme si l'Afrique révélait de façon paroxystique une revanche des contextes dont on peut trouver des exemples dans le monde entier.
Pour analyser ces processus, un dialogue est noué entre d'une part des données de terrain particulièrement riches, et d'autre part une vaste littérature en sciences sociales revisitée afin de mieux rendre compte des réalités observées. Le diagnostic est structuré autour de quelques concepts clés : modèles voyageurs, normes pratiques, modes de gouvernance et logiques sociales. Tout entier consacré à une démarche analytique rigoureuse, sans complaisance et sans polémique, il se termine néanmoins par une prise de risque face à la redoutable question " que faire ? ", en suggérant de mettre les normes pratiques au centre de toute intervention et de valoriser les " experts contextuels " aujourd'hui invisibles.
Ce livre constitue une contribution majeure à l'analyse des effets inattendus des politiques publiques.
"En puisant dans un large corpus de publications scientifiques, de documents de presse et d'archives, complété par des entretiens personnels avec des chercheurs et chercheuses en Serbie et en Croatie, cet ouvrage propose un examen critique de l'univers des sciences sociales yougoslaves pendant la période de crise qui va de la mort de Josip Broz Tito en 1980 à la fin de la guerre en Croatie et en Bosnie en 1995.
L'auteur montre que, malgré leur inéluctable position de faiblesse face aux grandes transformations politiques, économiques et sociales en Yougoslavie, de nombreux chercheurs et chercheuses réussissent à préserver certains espaces d'autonomie pendant cette période de crise. Par ailleurs, il souligne que, malgré la rupture que signifie le début de la dissolution yougoslave en 1991, il existe de nombreuses continuités conceptuelles et théoriques entre les années 1980 et les années 1990. Une grande partie des auteurs fait appel à des notions téléologiques du changement socioéconomique et à des notions idéalisées de la démocratie libérale qui servent à remettre en question le système communiste, mais n'éclairent guère le contexte postcommuniste : ils peinent ainsi à comprendre les transformations de l'espace post-yougoslave après 1990.
En somme, en se servant du monde des sciences sociales comme d'un prisme pour analyser la dissolution de la Yougoslavie, cet ouvrage offre des pistes de réflexion sur la crise du projet socialiste yougoslave et donne un récit actualisé et rigoureux de la crise et de la désagrégation yougoslaves."
Des etats généraux de la maltraitance se sont tenus à paris, en novembre 2005, à l'appel de l'association française d'information et de recherche sur l'enfance maltraitée (afirem).
Des professionnels de toutes les disciplines concernées se sont rencontrés pour échanger, débattre et faire le point sur les mauvais traitements à enfants, qu'ils soient physiques, psychologiques ou sexuels. le souci éthique et la mise à distance de la fascination médiatique ont présidé aux travaux. ces journées ont permis de faire un bilan sans complaisance des nombreuses avancées et des connaissances actuelles, mais aussi de prendre acte des impasses et des questions qui restent à résoudre.
Parallèlement, il s'est avéré nécessaire d'interroger comme facteurs de risques éventuels l'évolution présente de la parentalité et un contexte sociétal en pleine mutation. comment gérer au quotidien les complexités liées à la prise en charge de la maltraitance qui se heurtent inévitablement à de nombreux paradoxes le temps imposé par les décideurs ne peut pas se superposer à celui des professionnels, ni au temps d'élaboration nécessaire des familles.
Cet ouvrage reflète un foisonnement d'idées et de points de vue, parfois contradictoires, de la part de politiques et des professionnels. il resitue les normes et les limites existantes entre les exigences du processus éducatif et les données de la maltraitance, entre les besoins affectifs des enfants et les allégations d'abus sexuels, entre la protection et la pénalisation.
À l'encontre de l'opposition stéréotypée entre soufisme et salafisme, les contributions rassemblées dans cet ouvrage montrent la convergence entre certains ordres soufis et les mouvements salafistes dans leur enrôlement des subalternes, femmes, jeunes, et « castés » au Sahel musulman. Une telle évolution ne peut se comprendre que dans la longue durée et en connectant les espaces.
L'espace sahélien est marqué depuis le XIe siècle par une forte prépondérance de l'islam reposant sur un triptyque partagé avec l'ensemble du Maghreb voisin : malikisme, acharisme et soufisme confrérique. Ces confréries se sont propagées lors des révolutions musulmanes du XVIIIe siècle, et furent suivies par les Jihads expansionnistes du XIXe siècle. La « révolution voilée » des ordres soufis mauritanosénégambiens au tournant du XXe siècle reprit le message émancipateur initial, quoique beaucoup moins à l'égard des femmes.
Aussi les auteurs s'attachent-ils à étudier une génération ultérieure d'ordres soufis (1930-2021), celle de branches de la Tijaniyya qui, en opposition complémentaire avec les réformistes, poursuivit la lutte pour la reconnaissance islamique des subalternes par l'accès au savoir, à l'espace public religieux et aux positions d'autorité.
Cet ouvrage rassemble les travaux de spécialistes internationaux des études islamiques et des sciences sociales. Il est structuré autour de quatre thématiques : orthodoxie et orthopraxie ; islam et hiérarchies statutaires ; représentations raciales et pratiques ; genre et subalternité.
La violence des jeunes est un attribut tenace de l'ambiance les grandes métropoles comme Dakar confrontées à la croissance des inégalités, à l'effritement des liens de solidarité et à la dislocation du tissu familial. Elle fait l'objet de ce livre qui présente les résultats d'une étude empirique approfondie de deux communes de la région de Dakar : HLM, une zone lotie du département de Dakar, et Médina Gounass, un territoire non aménagé de la ville de Guédiawaye.
Les contributions montrent l'absence de liens directs de cause à effet entre la violence des jeunes et leurs conditions socioéconomiques. Elles apportent des éclairages nouveaux sur les déterminants de l'exclusion et de la violence chez les jeunes et le rôle du mal aménagement de l'espace urbain dans l'exposition des populations à la violence.
Cet ouvrage analyse les stratégies déployées par les jeunes eux-mêmes pour prévenir et lutter contre leur exposition aux situations de violence ainsi que le poids du genre. À travers des études institutionnelles, il jette la lumière sur les politiques et stratégies publiques de prévention et de gestion de la violence, leurs performances, vides et manques et les mesures d'amélioration pérennes à adopter. Il met à la disposition des chercheurs et professionnels des données uniques et une analyse intégrée de la question de la violence en milieu urbain et périurbain sous ses divers attributs. Il est aussi un référent pour les décideurs, centraux comme locaux, dans la construction d'une gouvernance partagée et efficace de la sécurité urbaine.
Comment et pourquoi devient-on historien de l'Afrique ? Des pistes sahariennes aux amphithéâtres de la Sorbonne, en passant par les forêts ivoiriennes, les salles de réunion ou les prisons algériennes, Pierre Boilley retrace avec humour et lucidité un itinéraire atypique, animé par la passion. Au fil de ce récit, on comprend comment des années de voyages et d'aventures peuvent servir de base au travail d'un historien de l'Afrique contemporaine, mais aussi que l'exercice d'un tel métier, loin de se limiter à la recherche, est un tourbillon d'enseignement, d'administration et d'activités collectives, sans oublier le rapport aux médias et les combats personnels autant qu'universels.
Être historien de l'Afrique, c'est utiliser des sources difficiles, écrites et orales, accepter les tourments matériels, la découverte et l'enracinement dans des cultures et des langues différentes, la déconstruction des stéréotypes. C'est souvent travailler en période de crise, mais avant tout vivre une aventure plurielle : aventure physique, intellectuelle et même institutionnelle. Cet ouvrage témoigne que les principes de plaisir et de liberté sont fondamentaux, quand ils sont sous-tendus par la curiosité et l'élan vers l'Autre.
Sur le continent africain comme ailleurs, les femmes et les enfants sont souvent les premières victimes des atteintes aux droits de l'homme. L'intérêt et la force de ce livre, réalisé sous l'égide de l'Institut danois des droits de l'homme (IDDH), sont d'en rendre compte en privilégiant une approche locale et concrète. Envisageant les difficultés rencontrées par des personnes vulnérables que les lois et les coutumes ne protègent pas suffisamment, les études rassemblées ici ont également l'avantage de prendre la mesure des évolutions à l'oeuvre en Afrique. Cet ouvrage se distingue aussi par sa diversité. Fruit du travail de onze chercheurs africains - pour l'essentiel des juristes ayant à coeur de privilégier une approche pluridisciplinaire -, il se penche sur les situations vécues dans huit pays : Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Kenya, Niger, Malawi, Ouganda et Togo. À cette diversité géographique, parfois doublée d'une approche comparatiste, s'ajoute une grande variété de thèmes abordés (mariage, divorce, violences faites aux femmes, protection des mineurs délinquants, participation des femmes à la vie politique.) pour tenter de prendre toute la mesure du sujet. Diversité linguistique enfin, dans la mesure où le principe éditorial retenu a consisté à permettre à chaque auteur d'écrire dans sa langue universitaire de prédilection. Les contributions se répartissent ainsi de manière sensiblement égale entre l'anglais et le français.
À Dakar (Sénégal), des enfants et des jeunes ont investi des recoins abandonnés de l'espace public. Ils vivent de mendicité, de récupération, de petits travaux, mais également de pratiques à la limite de la légalité (vols, consommation de stupéfiants...). Communément désignés par le terme de faqman (fugueur), ces jeunes quittent leur famille ou leur daara (école coranique) pour la rue.
Leur apparence, leurs comportements, leurs activités, mais surtout la perception qu'en ont les populations, leur valent d'être mis en marge et stigmatisés. Leur présence dans la rue est réprimée par les autorités publiques quand des acteurs humanitaires de leur côté proposent de les « réinsérer » dans la société. Qualifiés de marginaux qui quittent les cadres sociaux conventionnels pour développer dans la rue des « contre-valeurs », les faqman continuent toutefois de partager avec leurs concitoyens un même univers moral et symbolique.
Ce livre est une ethnographie de l'expérience que ces jeunes font de la rue. En s'intéressant au sens subjectif qu'ils donnent à leur présence dans les espaces publics, il déconstruit des approches de la figure du faqman jusque-là cantonné aux statuts de victime et de déviant.
Après avoir compté, en 2010, le milliard d'habitants, l'Afrique pourrait atteindre les deux milliards en 2050. Les citadins africains sont désormais plus nombreux que les villageois. L'importance de l'exode rural entraîne des problèmes relatifs à l'environnement, à la gestion des déchets et des difficultés d'accès à l'eau potable et à l'énergie... Ces questions concernent les Africains mais aussi tous les habitants de notre planète. Différents auteurs, historiens, philosophes, anthropologues, théologiens et biblistes tentent d'y répondre en focalisant leur attention sur différents points : comment penser, construire et gérer la ville africaine de demain dans le contexte de la mondialisation ?
Pour fuir leurs misères, les paysans africains accourent vers les villes, lieux de brassage de populations d'origines et d'appartenances diverses, provoquant des échanges, mais aussi des conflits et des crimes. S'indigner et réfléchir, c'est déjà louable ; et après ? Quels rôles peuvent jouer les enseignants, les étudiants et les personnes ayant différentes responsabilités sociopolitiques ou religieuses ? Les chrétiens doivent-ils fuir la ville, se lamenter et accuser les mauvais gouvernants d'hier ou les responsables de l'esclavage et de la colonisation ? Ils peuvent, certes, relever certains défis, à la suite du Christ qui veut donner à tous la vie en abondance (Jn 10, 10). Pour les auteurs, il est urgent d'inciter le monde entier à bien cerner les problèmes et à les traiter sérieusement, aujourd'hui, sans attendre 2020 ou 2050.
S'il n'est pas simple d'expliquer l'action de l'Agence française de développement (AFD), l'histoire permet d'en saisir la logique au fil de ses évolutions. Cet ouvrage vient compléter les travaux de François Pacquement sur l'histoire de la Coopération française, en retraçant celle de l'AFD à travers l'expérience de son agence de Cotonou. Il y reconstitue, dans le cadre du Bénin, nombre de thèmes qui ont concerné l'ensemble des pays en développement, tant ils ont souvent connu des évolutions comparables.
Ce livre se présente comme un récit à plusieurs voix, où partenaires béninois et responsables locaux de l'Agence prennent la parole, disent ce qui les anime, racontent l'histoire de leurs activités au service du développement et leur engagement commun. Il met l'accent sur la manière dont l'AFD est façonnée par ceux qui y travaillent, à tous les échelons, quels qu'ils soient.
Cet ouvrage propose un remarquable récit du développement en action, centré sur une série de tentatives visant à améliorer les paysages et les modes de vie. L'auteur y expose, en détail tant les pratiques qui permettent aux experts de diagnostiquer les problèmes et de concevoir des interventions, que la capacité d'action des personnes dont les conduites sont visées par les réformes. Combinant très efficacement théorie, ethnographie et histoire, il est mis en lumière le travail d'agents de développement ayant opéré à différentes époques : fonctionnaires et missionnaires coloniaux ; spécialistes de l'agriculture, de l'hygiène et du crédit ; activistes politiques ayant créé leurs propres modèles devant guider les villageois vers des vies meilleures. L'auteur décrit et analyse des opérations visant, sur financements extérieurs, à intégrer des objectifs de conservation de la nature et de développement via la participation des communautés, ainsi qu'un programme gigantesque, d'un milliard de dollars US, conçu par la Banque mondiale pour réactiver ou réinventer la communauté villageoise, inculquer de nouveaux comportements basés sur la compétition et le choix, et reconstruire la société « par le bas ».
Démontrant que la volonté d'« agir pour les autres » a une longue et complexe histoire, souvent troublée, Tania Murray Li identifie des récurrences fortes allant de la période coloniale jusqu'à l'époque actuelle. Attentive aux spécificités du développement dans les hautes terres de Sulawesi, en Indonésie, elle montre comment une série d'interventions se sont succédées et aussi imbriquées les unes dans les autres, et elle piste leurs effets contrastés, entre bien-être et famine, suivisme et mobilisation politique, solidarités nouvelles, résistance identitaire et action violente.
A partir d'une étude monographique conduite dans la région de Regueb - Sidi Bouzid, cet ouvrage analyse l'évolution récente des campagnes du Centre de la Tunisie, au regard de ses transformations socio-spatiales sur le long terme. Ces dernières décennies, les usages des ressources agricoles et les appropriations foncières ont connu de profonds changements. Sédentarisation forcée, partage des terres collectives tribales, mise en culture et irrigation de la steppe grâce aux eaux souterraines, essor des cultures destinées à l'export, implication croissante d'hommes d'affaires et de citadins dans le marché foncier : autant de facteurs clefs de la recomposition de cet espace rural à l'économie peu diversifiée.
En analysant les dynamiques socio-spatiales de ce pôle agricole national marqué par une accentuation des inégalités à l'échelle locale, cet ouvrage propose une lecture originale de la " révolution tunisienne " depuis les campagnes d'où sont parties les contestations populaires de 2010-2011. Il souligne la façon dont les politiques publiques et leur mise en oeuvre ont favorisé des dynamiques capitalistes spécifiques, dans une région où s'entremêlent de manière singulière logiques paysannes, entrepreneuriales et spéculatives.
Au-delà du cas de Regueb, c'est le rôle des élites nationales et locales, rurales et urbaines, dans les appropriations inégales de terre agricole qui est ici souligné. Invitant à repenser la lecture par le dualisme agraire, cet ouvrage contribue également aux débats sur le land grabbing en plaidant pour l'analyse des appropriations de ressources par des acteurs domestiques aux échelles régionale et locale.
Cette recherche met aussi en évidence les limites du modèle agricole intensif basé sur l'irrigation par les eaux souterraines promu depuis plusieurs décennies dans les campagnes nord-africaines, tout en apportant des pistes de compréhension de sa perpétuation et de son renouvellement.
Obstétrique et psychologie clinique, histoire des religions et anthropologie des rites, philosophie et théologie chrétienne s associent dans cet ouvrage pour cerner un vécu culturel, « les naissances insolites » au Kàsaayi (RDC). Il s en dégage plusieurs enseignements. La nécessité d abord d une combinaison de deux procédures, celles des sciences modernes et celle de la tradition kasayienne, pour mieux prendre en charge des naissances inattendues. Il y a ensuite la prise en compte des leçons d écologie, d acceptation de soi, de la nécessité du partage et de l optimisme dans les souffrances, d adoration de Dieu comme Créateur et Etre suprême. Enfin les questions d ordre théologique et philosophique, suscitées par l attention à ces naissances, peuvent amener chacun à méditer sur le don de Dieu enfoui dans tout être humain, bien portant ou infirme, sur la responsabilité de naître, sur la quête de beauté et de pureté, de liberté et de fécondité
Au cours des siècles passés, on a toujours considéré le plurilinguisme comme la caractéristique d'une époque de transition.
On peut maintenant se demander si, dans les sociétés actuelles, à grande mobilité individuelle et à diversité croissante, un changement de représentations n'est pas impératif. Le Cameroun est l'exemple type d'un Etat plurilingue dont le système éducatif repose sur une représentation globalement monolingue. L'échec de ce système plaide en faveur d'une utilisation raisonnée du plurilinguisme, qui permette la mise en valeur et la maîtrise des cultures traditionnelles aussi bien que de la culture moderne.
L'auteur présente, de façon remarquablement argumentée, les avantages d'un trilinguisme extensif, dont l'Afrique ne serait pas le seul champ possible d'application.
Ce livre propose une sorte de " refondation ".
En le lisant, on a l'impression que l'auteur dit que nous, Africains d'aujourd'hui, qui répugnons désormais aux interrogations sur la valeur de nos modes anciens de pensée, cherchons à nous installer dans le mode de pensée de l'Autre. Mieux encore, selon l'auteur, nous privilégions d'instinct les questions de méthode plutôt que les questions de fond : " [...] le problème n'est plus [...] : existe-t-il ou non une philosophie africaine - au sens d'une philosophie traditionnelle ? mais : quelle tâche ou ensemble de tâches, identifiables selon des critères à définir, se propose ici et maintenant, quelqu'un qui entreprend de philosopher dans et sur les sociétés africaines à travers leur expression multiforme ? " Mamoussé Diagne essaie de nous faire sentir une réalité qui demeure, au sens strict du terme, impensée.
Ce qu'il propose, c'est d'abord d'apprendre à discerner les chances non réalisées qui sommeillent dans les replis de l'oralité, à savoir " le rapport entre dramatisation et philosophie " et d'oser une sorte d'exode de la pensée devant cet " obstacle " qu'est la dramatisation. C'est peut-être là le vrai mérite de ce livre. Si je l'ai bien lu, j'ai l'impression qu'il veut nous inviter à préférer le questionnement véritable, l'interrogation philosophique au pugilat, il veut nous inviter à dépasser ce qui nous fait le plus de mal aujourd'hui, à nous Africains.
Il veut nous aider à sortir de ce que le journaliste franco-américain Stephen Smith, à la suite de Stanislas Adotévi, appelle dans son livre " Négrologie " pour que notre continent apprenne à penser, c'est-à-dire à ne jamais se satisfaire de ses traditions et soit capable d'en inventer d'autres et de nouvelles plus porteuses. Bonaventure Mvé-Ondo, docteur en philosophie, vice-recteur de l'OIF.
Cahier photos couleur de 16 pages.
Ce livre propose de découvrir le football en Afrique du Sud, à travers le quotidien d'un club de football africain amateur : le Mighty 5 Star, club réputé de Kayamandi, township de la ville très rugbystique de Stellenbosch, située dans la province du Cap occidental. Reconnu comme l'un des trois sprots nationaux depuis 1994, célébré par la coupe du monde 2010, le football est un symbole de la culture de la majorité noire du pays.
Menée entre 2005 et 2009, cette enquête ethnographique décrit comment ce sport participe diversement à organiser la vie du township. Comme beaucoup d'associations oeuvrant dans ces quartiers pauvres, il tisse des solidarités mais il suscite aussi, de par son essor actuel, l'espoir d'une ascension sociale.
Investir dans le développement durable à l'international mobilise des ressources financières substantielles, qui ne peuvent produire leur effet sans d'indispensables ressources humaines pour les rendre opérationnelles.
En France, la coopération technique a concerné beaucoup de professionnels, de nombreuses structures, dans tous les domaines. Activité soutenue, elle a pris des formes diverses et a connu de nombreuses mutations, avec des moments très intenses. Comment s'y retrouver dans cette histoire ? Ce livre s'attache à suivre le fil de ces diverses initiatives et de leurs avatars, ce qui débouche sur une véritable généalogie d'Expertise France, désormais le principal opérateur public du domaine.
Par-delà les destins de ces structures, une approche spécifique se déploie, autour d'un fort dénominateur commun. La fusion d'Expertise France et de l'AFD est l'occasion de faire un point sur l'assistance technique, sa forme, son économie et ses enjeux stratégiques, dans une période de profonde mutation de la coopération française.
« L'ouvrage proposé ici constitue une nouvelle avancée pour l'anthropologie médicale. La manière, c'est le sens et la rigueur de la description ethnographique, s'attachant tout particulièrement à l'examen de ce qui fait de ce lieu un monde de matérialités. Ainsi qu'un entrelacs d'espaces au sein desquels circulent et interagissent soignants, soignés et accompagnants. Le lecteur découvrira une ethnographie minutieuse d'un monde hospitalier et de ses matérialités, qui constitue aussi un excellent apport à l'anthropologie politique du Cameroun » (Jean-Pierre Dozon).
« Portait d'hôpital » est un objet-livre, c'est aussi un récit et un cheminement au sens premier du terme. Le lecteur suit les pas de l'auteure qui l'emmène dans le Cameroun, son histoire, la région de l'Extrême Nord, son hôpital et ainsi de suite jusqu'aux plus intimes des gestes de soignants. Après l'anthropologue « embarqué » dans les équipes médicales envoyées sur des terrains épidémiques, on a là, le lecteur « embarqué » dans un récit avec conviction. Un livre des plus revigorant intellectuellement, qui s'inscrit en « terrain connu » (Laurent Vidal).
« En nous invitant à partager la vie quotidienne d'un hôpital camerounais, Josiane Tantchou nous fait partager ce que le regard anthropologique a de plus original et de plus précieux à offrir : il révèle ce que l'on ne voit plus des choses les plus visibles. L'hôpital est ainsi décrit dans ce qu'il a de plus ordinaire et de plus matériel : les formulaires et les stylos Bic, les lits, les microscopes. À partir des lieux et des objets s'ouvrent alors un espace de réflexion et de critique sur les systèmes et les professions de santé dans l'Afrique du 21e siècle. Nourri par une conversation théorique riche et actuelle, l'ouvrage de Josiane Tantchou parvient à renouveler en profondeur le genre de l'ethnographie hospitalière » (Guillaume Lachenal).
En ces moments de transformations politiques souvent violentes et avortées, de réinterprétation des significations et de manifestations de la démocratie, il est utile d'analyser comment la liberté d'expression se réincarne dans les lieux où, longtemps brimée, elle a été arrachée comme un butin de guerre.
La matière empirique observée ici est la presse camerounaise, ses enjeux, ses repères intellectuels, ses pratiques, ses règles non écrites et ses normes tacites. L'ouvrage évalue les itinéraires, les gains, les hoquets, les dérives des modes de représentation dans un contexte où le pouvoir politique sévit ouvertement ou discrètement, où les calculs successoraux criminalisent la différence et où les manoeuvres politiciennes fabriquent un sentiment ethnique artificiel, mais prégnant.
Déconstruisant l'imaginaire médiatique, Autoritarisme, presse et violence au Cameroun déchiffre les non-dits du langage, l'idéal narcissique des journalistes, les éruptions de colère réelle ou manufacturée, la dictature de l'intuition, la banalisation du mauvais goût et les dérives du subjectivisme. Ce faisant, le livre esquisse une écologie du malaise social et les paradoxes d'une modernité africaine en chantier permanent. « Le livre d'Alexie Tcheuyap, écrit Fabien Éboussi Boulaga dans la préface, apporte un éclairage essentiel et inédit dans les zones des bavardages volubiles et creux de l'autoritarisme ambiant, avec sa violence atmosphérique et palpable. Le mérite d'Autoritarisme, presse et violence au Cameroun est de nous avoir fait dériver vers des pics où nous commençons à entrevoir ce que parler en humain veut dire. »
L'évolution actuelle des politiques agricoles plonge les agriculteurs dans une profonde incertitude économique, due à la variation des prix et à une instabilité politique consécutive à la redéfinition des conditionscadres et des modalités d'octroi des aides publiques. La libéralisation des marchés prônée par les politiques publiques française et suisse, ou la perspective de l'abandon d'une production administrée comme au Québec soumettent les agriculteurs à une intense pression psychologique et à une précarité économique auxquelles il est difficile de faire face. Quels effets ces changements génèrent-ils en termes de surcharge, de stress et d'image de soi et du métier ? Comment continuer à être paysan et vouloir transmettre sa ferme dans de telles situations ? Le mal-être des agriculteurs dépend-il bien du contexte politique et économique ? Pour répondre à ces questions, qui interrogent tant le contexte socioéconomique que la faculté des politiques agricoles à gérer la situation sociale et psychologique des agriculteurs, une équipe internationale de chercheurs a comparé la situation des éleveurs laitiers de Suisse, de Franche-Comté et du Québec. Leurs constats alarmants, présentés dans cet ouvrage sous une forme didactique, soulignent l'urgence d'une réflexion sur la durabilité sociale des agricultures occidentales. Yvan Droz, anthropologue, enseigne à l'IHEID à Genève et est professeur associé à l'université de Laval au Canada. Il a publié Un métier sans avenir ? (avec J. Forney). Valérie Miéville-Ott, ethnologue, cheffe de projet chez AGRIDEA, est coauteure de Anthropologie politique du paysage (avec Y. Droz, J. Forney et R. Spichiger). Dominique Jacques-Jouvenot, professeure de socio-anthropologie à l'université de Franche-Comté, a publié Les maux de la terre (avec J.-J. Laplante, 2009) et Socio-anthropologie de la transmission (avec G. Vieille Marchiset, 2012). Ginette Lafleur, doctorante en psychologie communautaire à l'université du Québec à Montréal, étudie les conduites suicidaires des agriculteurs au Québec et en Suisse, et a publié l'Enquête sur la santé psychologique des producteurs agricoles du Québec (avec M.-A. Allard).